L’amour fait naître la jalousie, mais la jalousie fait mourir l’amour - Christine de Suède
Elle est si loyale, efficace, dévouée, aimante. Et si jeune ! Si jeune et si fraîche !»
All about Eve, le film réalisé par Joseph Mankiewicz en 1950 fut récompensé par six oscars. Une récompense méritée, ne serait-ce que pour cette scène dans laquelle le jeu de Bette Davis (Margo) est époustouflant et ses yeux d’une expressivité rare. Peur et colère sont deux manifestations de la jalousie et, à la source de celle-ci, la
comparaison…
La fin de la scène signe une autre composante de la jalousie :
- Margo : « il se trouve qu’il y a certains éléments de ma vie dont j’aimerais avoir le droit et le privilège exclusifs ».
- « Par exemple, comme quoi ? » dit Bill, feignant l’incompréhension…
- « Par exemple comme toi ! » répond Margo avec force.
- Bill : « Là, je devrais te prendre dans mes bras et te rassurer. Mais je suis trop en colère ! »
Nous vivons tous, à des degrés divers, le sentiment de jalousie. Que ce soit sur le plan familial, amoureux, amical, professionnel. Aborder le thème de la jalousie lors du Café ennéagramme du 23 juin 2018, fut l’occasion de :
prendre conscience que la jalousie est une souffrance, aussi bien pour la personne qui la vit que pour l’entourage.
- souligner la dimension légitime de la jalousie : elle invite à protéger ce que la personne considère comme menacé et lui donne l’énergie nécessaire pour prendre les mesures permettant d’éviter cette perte.
- s’interroger, en petits groupes, sur sa façon d’aimer : ne suis-je pas dans un désir
- d’exclusivité ? Dans ma quête du lien d’amour, quelle représentation ai-je de l’amour ? Ne suis-je pas dans un désir de posséder l’autre ? Un amour-possession ? Quel est mon degré de confiance en l’autre ? En moi ?
À la place de la jalousie, l’ennéagramme propose de changer quelque chose en soi : développer l’âme égale.
Ce sera le sens de l’extrait d’un second film, celui réalisé par Robert Redford : L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux. Après plusieurs mois de patience, Robert Redford parvient à dompter le cheval que Kristin Scott Thomas lui a confié. Entre temps Kristin, mariée à un avocat, s’est éprise de Robert. Le mari, qui est venu rejoindre sa femme durant quelques jours, remarque le sentiment amoureux de sa femme pour Robert. Au moment de repartir à New York pour son travail, il fait une suggestion à sa femme : « Prend ton temps, Annie… » et ajoute, avec douceur, « la vérité, c’est qu’aujourd’hui tu ne sais plus où tu en es avec moi. Tu ne sais pas si tu veux toujours partager ta vie avec moi. La vérité, c’est que je ne tiens pas à ce que tu rentres à la maison tant que tu n’en es pas sûre, quelle que soit ta décision. D’accord ? » D’un signe de tête, elle approuve, se jette dans ses bras et pleure silencieusement.
Ni cris, ni rage, ni drame de la part du mari. « Soit je me bats contre l’évidence, soit je l’accepte » dit-il avant de faire sa suggestion à sa femme. On retrouve la même égalité d’humeur chez Robert Redford au moment où Kristin quitte le ranch pour rejoindre son mari : « Je n’ai rien cherché. Je t’aime, c’est tout ! C’est quelque chose qui sera toujours en moi ». Entendant le van partir, Robert ferme les yeux, contient sa douleur, esquisse un sourire, reprend sa respiration.
Laisser la femme libre de son choix ! Un bel exemple d’amour chez ces deux hommes, loin de l’amour-possession…
Pierre Angotti, Compiègne le 23 juin 2018